Le groupe Audi a publié des résultats en demi-teinte pour les neuf premiers mois de 2025, sur fond de ralentissement mondial et de restructuration interne. Si le chiffre d’affaires progresse de 4,6 % à 48,4 milliards d’euros, le bénéfice opérationnel recule à 1,6 milliard, contre plus de 2 milliards un an plus tôt. La marge d’exploitation tombe à 3,2 %, affectée par les droits de douane américains, des provisions CO₂ et le report du développement d’une plateforme électrique commune pour le segment D.
Malgré ces vents contraires, la direction revendique une transformation stratégique profonde. Le directeur général Gernot Döllner affirme recentrer l’entreprise sur “l’essentiel”, via une simplification des gammes et une réduction de la complexité industrielle. “Nous façonnons notre entreprise comme nous concevons nos véhicules : avec clarté et rigueur”, a-t-il déclaré. L’« Audi Agenda » a servi de base à cette réorientation, censée rendre le constructeur plus agile et plus innovant.

Des livraisons en repli, sauf pour les modèles électriques
Entre janvier et septembre, Audi a livré 1,18 million de véhicules, soit une baisse de 4,8 %. La demande reste toutefois très dynamique sur le segment électrique : les ventes de modèles 100 % batterie ont bondi de 41 %, atteignant 163 000 unités. Le Q6 e-tron, lancé récemment, concentre une large part de ce succès avec près de 64 000 livraisons.
L’Allemagne, marché domestique du constructeur, tire particulièrement cette croissance. Les ventes de véhicules électriques y ont progressé de 70 %, tandis que les volumes globaux ont légèrement augmenté (+1 %). En Europe, Audi livre 341 000 véhicules (–4 %), dont 79 200 électriques (+43 %). En Amérique du Nord, la marque subit la pression tarifaire des États-Unis (–5 %), mais les ventes de BEV s’envolent (+54 %).
La Chine, premier marché d’Audi, reste sous tension. Les volumes reculent de 9 %, à 434 000 unités, sous l’effet d’une concurrence exacerbée. Plusieurs nouveautés locales – A5L, Q6L e-tron et le premier modèle de la marque sœur AUDI E5 Sportback – doivent néanmoins contribuer à un rebond progressif.
Les marchés émergents constituent un point positif : les ventes y augmentent de 6 %, et celles d’électriques de plus de 50 %.
Les marques du groupe à la peine
Le ralentissement ne touche pas qu’Audi. Bentley a livré 7 236 voitures (–2 %) et vu sa marge d’exploitation divisée par plus de deux, à 6,1 %. Lamborghini recule légèrement à 8 140 unités (–3,2 %), avec un chiffre d’affaires stable à 2,4 milliards d’euros et une marge solide de 24,6 %, contre 27,9 % un an plus tôt. Ducati, enfin, voit ses livraisons baisser de 4 % (41 973 motos) et sa rentabilité passer de 12 % à 6 %.
Le résultat net du groupe ressort à 2,06 milliards d’euros, contre 2,43 milliards en 2024. Le flux de trésorerie disponible s’établit à 2,1 milliards, en forte baisse (–45 %), en raison notamment de l’acquisition complète de Sauber Holding AG et de l’absence d’un dividende exceptionnel perçu l’an passé.
Une transformation stratégique pour préparer 2026
Le directeur financier Jürgen Rittersberger insiste sur la discipline budgétaire : “Un contrôle rigoureux des coûts est indispensable pour rendre notre modèle économique durable.” Audi poursuit la réduction du nombre de versions, la simplification des processus et la réallocation des ressources vers les futurs domaines clés : électrification, digitalisation et design.
L’année 2026 marquera le lancement de la plus vaste offensive produit de l’histoire du groupe :
- Un modèle d’entrée de gamme 100 % électrique,
- Une nouvelle génération de SUV thermiques plus efficients,
- Le premier SUV du segment D, l’Audi Q9, destiné au haut de gamme mondial.
- Les modèles RS haute performance offrant une dynamique de conduite maximale.
Prévisions prudentes pour la fin d’année
Pour l’ensemble de 2025, Audi anticipe un chiffre d’affaires compris entre 65 et 70 milliards d’euros, une marge opérationnelle ramenée entre 4 et 6 %, et un flux de trésorerie net de 2,5 à 3,5 milliards. Ces perspectives reposent sur une hypothèse clé : la disponibilité stable des semi-conducteurs et composants électroniques.
À plus long terme, le constructeur veut s’affirmer comme pionnier d’une mobilité “premium durable et connectée”, selon la formule officielle. En 2024, le groupe avait livré 1,7 million d’Audi, 10 643 Bentley, 10 687 Lamborghini et 54 495 Ducati, pour un chiffre d’affaires global de 64,5 milliards d’euros. Plus de 88 000 salariés, dont 55 000 en Allemagne, accompagnent cette mutation industrielle et culturelle.

Un tournant stratégique majeur
Entre pression réglementaire, hausse des coûts de production et transition électrique, Audi fait face à des arbitrages structurants. La direction mise sur une réorganisation profonde et un recentrage autour de produits phares pour maintenir sa compétitivité face à Tesla, BMW, Mercedes et aux nouveaux entrants chinois.
L’essor rapide de l’électrique dans le mix produit – désormais plus de 13 % des ventes – témoigne du virage déjà engagé. Mais le défi reste considérable : améliorer la rentabilité tout en finançant les nouvelles plateformes technologiques et en absorbant les effets d’un marché mondial toujours instable.
En clair, Audi entre dans une phase de consolidation stratégique : moins de modèles, plus d’efficacité et une priorité affichée à la performance durable.

Laisser un commentaire